Paris-Manchester 1918
Conservatoires en temps de guerre

Philippe Gaubert. L’expérience du témoignage

5 juillet 1879 (Cahors) – 8 juillet 1941 (Paris)

Anonyme, 1910 : Philippe Gaubert, photographie positive, 14×9,5 cm, Bibliothèque nationale de France, département de la Musique, Est. Gaubert 001. En ligne

Issu d’un milieu modeste (son père était cordonnier et sa mère couturière), Philippe Gaubert débute l’apprentissage de la musique par le violon, puis il continue par l’étude de la flûte. Repéré par Paul Taffanel (1844-1908), il obtient dans sa classe un premier prix en 1894. Nommé première flûte solo à l’orchestre de l’Opéra en 1895, il poursuit des études de composition au Conservatoire, où il remporte un premier prix de contrepoint et fugue suivi d’un premier Second Grand prix de Rome en 1905. En parallèle, il se lance dans une carrière de chef d’orchestre et devient le second chef de l’orchestre de la Société des concerts du Conservatoire en 1904. La guerre interrompant sa carrière, il obtient le poste chef principal en 1919 et restera à la tête de la formation jusqu’en 1938. En 1920, il devient premier chef de l’Opéra avant d’être promu chef de la musique en 1931 puis directeur de la musique en 1939. Il poursuit en parallèle une carrière de pédagogue suite à sa nomination au poste de professeur de flûte au Conservatoire en 1919 puis au poste de professeur d’orchestre et de direction d’orchestre en 1931. Philippe Gaubert s’éteint dans l’exercice de ses fonctions en 1941.

Mobilisé en 1914, Philippe Gaubert sert comme brancardier-musicien. Les sources à notre disposition permettent d’établir qu’il se trouve dans le secteur de la tranchée de Calonne, sur les hauteurs de la Meuse, en 1915, théâtre de terribles combats cette année-là. Promu sergent, en charge d’une petite musique régimentaire, Philippe Gaubert est décoré avec palmes. Durant ces années, il compose ses Poèmes pour voix et piano ainsi qu’une Suite pour flûte, violoncelle et piano.

Cette partie de l’exposition est destinée à nous interroger sur la valeur du témoignage et de notre positionnement à son égard. Témoignage souvent « à chaud », écrit dans des conditions précaires, la parole déposée sur le papier n’en reste pas moins une entreprise de reconstitution par l’écriture d’une réalité qui nous échappe, et qui souvent, dans le cas de la Grande Guerre, semble dépasser son locuteur. Le témoignage, souvent partiel à cause des différentes formes de censures, répond également à une stratégie : celle d’une publication à l’ensemble d’une corporation, ici les élèves et anciens élèves du Conservatoire.

Bibliographie

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Lien: http://data.bnf.fr/13894334/philippe_gaubert/